Psychologie du rêve : Freud versus Jung
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Quand on s’intéresse à la psychologie du rêve, on pense à Freud et à son livre “L’interprétation du rêve” . C’est son livre le plus vendu. Et bien souvent, on ne connaît pas les travaux de Jung.
Dans cet article nous allons évoquer ces deux conceptions du rêve intéressantes de deux analystes que le rêve a rapproché, qui furent amis grâce à leur intérêt pour le rêve, et dont l’amitié faite d’admiration sincère et jalonnée de désaccords théoriques fondamentaux, aboutit à un conflit qui perdure encore de nos jours dans les guerres de chapelles des différentes écoles de psychologie.
Comment j’ai découvert la psychologie du rêve ? Grâce à la philo !
Au lycée, j’avais un prof de philo génial. Je me souviens très bien de ses cours. D’ailleurs je les ai gardés. A l’époque, le programme commençait par une réflexion sur la conscience. Plusieurs cours étaient consacrés à Freud, à sa conception de l’appareil psychique, sa théorie de l’inconscient personnel, et sa psychologie du rêve. Aujourd’hui ça me questionne : Freud avait-il sa place dans un cours de philo ?
Je me souviens qu’en conclusion de ce cours, le prof avait rapidement fait allusion à la théorie de l’inconscient collectif de Jung, en guise d’ouverture. Je lui avais demandé ce qu’il en pensait, il m’avait laissé entendre qu’il était plutôt de ceux qui allaient dans le sens de Jung…
Ce moment est assez précis dans ma mémoire : ça avait sonné, on était sorti. Jung était sur la dernière phrase de conclusion du cours sur la conscience. Ca avait l’air de m’intéresser. Mais l’éducation nationale en avait décidé autrement et il allait me falloir attendre des années pour redécouvrir Jung par moi même, au fil de mes lectures sur le rêve et la psychologie.
La psychologie du rêve selon Freud :
La théorie freudienne
Ainsi comme moi, plusieurs générations de bacheliers ont appris le B-A-BA de la théorie freudienne du rêve en philo : “le rêve est l’accomplissement déguisé d’un souvenir refoulé”.
Autrement dit le rêve va sauter sur la première occasion pour ressasser le passé selon Freud. Un événement ressemblant de près ou de loin à quelque chose de vécu sera le prétexte pour le rêve de ressortir le vieux trauma, le vieux désir inassouvi, qui ainsi se voit actualisé.
Ceci est rendu possible grâce à une organisation douanière stricte qui protège le Moi selon Freud : la censure endopsychique. La censure laisse passer les désirs corrects, les pensées acceptables d’après Freud. Le reste ne passe pas, reste bloqué dans l’inconscient. Grâce à l’état de sommeil, les désirs jugés inacceptables peuvent passer la censure et arriver au souvenir, sous forme de rêve, donc dans un langage symbolique qu’il va falloir décrypter.
Le rêve est donc selon Freud un moyen pour l’inconscient d’accomplir un souhait qui ne peut pas s’accomplir dans la vraie vie. Une manière de décharger l’inconscient du poids de ce désir. Et un moyen pour l’analyste de remonter à l’événement initial qui a créé ce souhait “bloqué”.
Ce qu’on doit à Freud
- Freud a sorti le rêve des griffes du matérialisme qui le réduisait à un délire hallucinatoire, un bug du cerveau.
- Freud a affirmé : non, le rêve ne sert pas à rien, sinon on ne rêverait pas. Il a posé la première pierre de la psychologie du rêve contemporaine et il a rendu au rêveur le droit de comprendre ses rêves.
- Freud a été un fin observateur des mécanismes de production du rêve, en tant que discours de l’inconscient, de même qu’il a été un fin observateur des subtilités du langage et des interactions en analyse.
- On doit à Freud la phrase “le rêve est la voie royale vers l’inconscient” ce qui est vrai à 300 %
Ce qu’on peut reprocher à Freud :
- Avoir cherché à utiliser le rêve pour entériner sa théorie des névroses : le trouble ayant une étiologie à rechercher dans la petite enfance, avec une problématique d’ordre sexuelle (réelle ou fantasmée) d’après Freud.
- Avoir fait du rêve un petit farceur qui procède par camouflage, un peu comme un bouffon du Roi qui se permettra de critiquer le souverain à condition de se faire passer pour fou.
- N’avoir pas tenu compte de la dimension prospective du rêve : le fait que le rêve soit tendu vers l’avenir (et donc d’avoir éludé le phénomène du rêve prémonitoire par exemple).
- D’avoir consacré une grande partie de son livre à dresser une clé des songes sexuelle.
- De réduire le rêve à un élément de diagnostic en faveur de son propre travail et à l’exclusion des autres
Conséquence de l’influence de la théorie freudienne du rêve en psychologie :
- La théorie freudienne est à peu près la seule abordée à l’université à propos de la psychologie du rêve, trop rapidement sûrement, et même au lycée !
- Pourtant depuis le temps, on sait qu’elle n’évoque qu’un certain type de rêve, et certainement pas tous les rêves !
- Ainsi de nombreuses personnes ne s’intéressent pas à leurs rêves car ils se disent : “oh là là! Si mon rêve parle d’un désir refoulé à connotation sexuelle… Je ne veux pas savoir!”
- En plus, les psy qui ne sont pas allés plus loin que ce livre vont chercher à retrouver systématiquement un trauma ancien dans le rêve de leur patient et bien souvent partir dans la mauvaise direction : la plupart du temps, le rêve parle du présent !
- Enfin, si Freud a bien des égards mérite tout notre respect, il ne faut pas oublier que sa psychologie est un paradigme clos, où tout est parfaitement imbriqué… Mais ça reste un paradigme ! Et son approche de la psychologie du rêve fait rentrer l’approche interprétative, coûte que coûte dans ce paradigme psychanalytique.
-> Heureusement après Freud, il y a eu Jung, et fini les paradigmes et les théories fermées !
Jung et Freud : une rencontre déterminante
Jung rencontre Freud après avoir lu son livre L’interprétation du rêves. Les deux hommes ont une réelle admiration l’un pour l’autre. Des désaccords surgissent sur des points théoriques fondamentaux : pour Freud, l’énergie psychique, la libido est d’ordre sexuelle . C’est la pulsion de vie, la pulsion sexuelle.
Pour Jung la libido, la pulsion de vie, n’est pas sexuelle. Elle est créativité, inventivité, elle est santé, elle est mouvement, elle est autant psychique que physique, et elle est aussi sexuelle mais la sexualité n’est qu’un de ses aspects, et certainement pas la nature de la libido. Jung se rend compte aussi qu’il y a énormément de types de rêves différents et que la méthode d’interprétation des rêves mise au point par son ami Freud ne marche pas souvent. Le dialogue est compromis : ils se fâchent.
Le rêve selon Jung :
Jung va aborder l’interprétation des rêves non pas comme une science, ainsi que l’entendait Freud, mais comme un art, renouant ainsi avec la mentalité des interprètes de l’antiquité. Pour Jung l’étude du rêve c’est d’une certaine manière l’étude de l’âme, or l’âme n’est pas l’affaire de la science.
En travaillant sur les rêves, il va continuer une enquête qu’il avait déjà commencé en travaillant avec ses patients en psychiatrie. Et si, dans le délire psychotique, comme dans l’univers fantastique des rêves, on avait affaire à un état de la pensée antérieur au logos, antérieur au filtre du mental. Donc en apparence décousu mais en réalité faisant sens. Et alors, si la pensée était initialement symbolique, comme le rêve, comme le délire psychotique, et donc comme les oeuvres d’art, comme les symboles religieux ou païens, comme la poésie… Est-ce qu’on aurait pas, dans l’étude de la psychologie du rêve, la possibilité de découvrir la manière dont se structure la pensée humaine ?
Deux concepts jungiens importants pour la psychologie du rêve
L’inconscient collectif
Ainsi Jung va ajouter un niveau supplémentaire d’inconscient, à l’inconscient personnel de Freud. Derrière l’inconscient personnel, donc avant la banque à souvenirs de l’individu et toutes les choses qu’il a refoulé, Jung propose le concept de l’inconscient collectif : le réservoir les structures qui permettront de fabriquer de la pensée.
Les hommes, où qu’ils vivent, dans quelque continent, dans quelqu’île, et à n’importe quelle époque, ont toujours pensé de la même manière et ressenti les mêmes émotions. C’est pourquoi il n’y a qu’une seule race humaine : la race humaine.
Les hommes ont érigé des religions, des cultes des morts, des médecines, des civilisations, des hiérarchies, des lois… influencés bien sûr aussi par leur milieu et leur histoire. Mais les sentiments sont partout les mêmes, ainsi que les conflits existentiels.
Ainsi, l’inconscient collectif est ce qui relie tous les hommes par leur nature humaine, et on peut reconnaître ces structures dans la spontanéité du rêve, dans l’inspiration artistique, dans les représentations picturales, dans les légendes, les contes, les mythes du monde entier.
Les archétypes
Jung a donc choisi le terme “archétype” pour désigner ces grands prémisses humaines qui structurent l’inconscient collectif, donc la pensée humaine, et dirigent le monde : archétype de l’amour, du divin, de la guerre, de la sagesse, de l’âme, de la maternité, de la liberté, de la virilité… etc etc
Conclusion :
Pour Jung le rêve n’est pas un subterfuge de la psyché pour accomplir virtuellement un désir interdit. Le rêve est étrange parce qu’il raconte ce que vit le rêveur dans un type de discours particulier qui est celui de la pensée à l’état brut. Le rêve peut parler du passé, mais aussi du futur et surtout du présent. L’âme s’exprime à travers le rêve, ce que les cultures antiques d’Europe et d’Afrique du Nord, mais également orientales, asiatiques, animistes, et aborigènes soutiennent depuis la nuit des temps.
Si cet article vous a plu, je vous invite à regarder mes vidéos sur Youtube à propos du rêve et de la psychologie analytique de Carl Gustav Jung
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