La projection en psychologie analytique : qu’est-ce que c’est ?
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La projection est une notion essentielle en psychologie, dans toutes les écoles de psychologie, et aussi en psychologie analytique. Tout simplement car c’est l’un des mécanismes de base de la psychologie humaine.
Aujourd’hui je vais donc vous expliquer plusieurs aspects que revêt ce phénomène afin que vous puissiez mieux naviguer dans la compréhension de vos relations interpersonnelles, de vos réactions et de vos émotions.
On commencera par une définition simple. Et puis on la déclinera au fil des exemples présentés afin de voir dans des situations courantes comment les projections se manifestent. Puis nous termineront par la place de la projection en thérapie.
La projection : définition en psychologie
La projection désigne le fait de projeter. Projeter signifie que quelque chose qui nous appartient est reconnu à l’extérieur. Comme un vidéoprojecteur qui va “projeter” un film sur un écran si bien qu’on a l’impression que le film provient du mur, de l’écran… Alors qu’il vient de la machine qui est à l’opposé de la pièce.
Imaginez vous donc comme un projecteur. Le film correspond à votre vision des choses, votre sensibilité à vous. Votre manière de percevoir le monde et ce que vous donnez à voir.
Maintenant imaginez que lorsque vous êtes en contact avec quelqu’un, dans une relation, dans une conversation… Ou lié par un lien qu’il soit familial, amoureux ou professionnel… C’est comme si vous étiez deux projecteurs qui chacun va projeter sur l’autre son propre film.
Avec cette image vous pouvez prendre déjà la mesure de la difficulté de base qui existe dans toute relation. Il s’agit de deux petits mondes uniques et singuliers qui se font face : votre monde, et le monde de l’autre. Votre point de vue, et le point de vue de l’autre.
Ainsi, la difficulté est une donnée incontournable du principe de relation. En prendre conscience peut déjà permettre de renoncer à une certaine forme d’idéal qui voudrait que l’on ne s’entoure que de relations harmonieuses, et de personnes qui partagent notre vision des choses. C’est tout simplement impossible car chacun est unique. Renoncer à cet idéal d’entente, de compréhension, d’empathie et de réciprocité est donc un point de départ important pour précisément améliorer notre rapport à l’autre et à soi-même.
Différentes situations pour illustrer ce principe de projection
Projeter un conflit de valeur sur l’autre
La manière la plus facile de reconnaître une projection courante qu’on peut être amené à faire, c’est d’analyser ses relations amoureuses. Le couple étant rendu possible dans un désir de fusion, les personnes s’attirent parce qu’elles ont chacune des accroches dans leur personnalité qui les rendent intéressante pour l’autre.
Ces “accroches” c’est ce qu’on désigne par l’expression “avoir des atomes crochus”. C’est cette idée !
Avoir des atomes crochus, c’est donc partager des points communs. Des goûts, des centres d’intérêt, des valeurs, des manières de voir le monde, des activités, une forme d’humour… Bien entendu, si on n’a rien en commun, on ne va pas s’attirer ! « Qui se ressemble s’assemble » dit le dicton.
Et puis, rapidement on voit chez l’autre ce qu’il a de différent de Soi. On s’imagine alors dans une relation complémentaire, où l’autre, dans sa différence, nous complète. On tombe donc à ce stade dans une recherche de fusion, dans un idéal de fusion. On se raconte que l’autre a le tempérament inverse du sien puisque, pour citer une autre expression “les opposés s’attirent”.
- Mais alors qu’est-ce que les opposés ?
Il y a des couples effectivement qui semblent organiser leurs traits de personnalité dans le cadre du duo, ça fonctionne et c’est très bien. Il y a d’autres fois où cet antagonisme dure dans une tension de lutte et où les opposés sont plutôt du genre à s’affronter. La relation se transforme en joute.
Ce qui est intéressant c’est que les opposés sont finalement les deux facettes d’une même pièce ! Oui vous pouvez relire cette phrase : les opposés sont les deux facettes d’une même pièce. D’un même archétype.
Et donc ce que l’on reconnaît en l’autre, et qui nous touche, nous émeut, ou nous énerve énormément, c’est quelque chose qui existe en nous. C’est donc une occasion de projection. Si cette qualité ou ce défaut que l’on voit chez l’autre n’existait pas en soi-même, elle ne nous toucherait pas autant. La façon dont on est affecté par le comportement de quelqu’un doit donc nous mettre la puce à l’oreille : « Tiens, ça m’énerve vraiment beaucoup : qu’est-ce que ça dit de moi ? Où en suis-je moi-même par rapport à cette problématique ? »
L’exemple du mensonge et de la vérité
Par exemple : prenons l’exemple d’un couple qui a de nombreuses disputes autour de la question du mensonge. L’un des deux ment souvent, pour lui ce n’est pas très grave, pour l’autre c’est terrible ! L’autre ne supporte pas le mensonge. Aucun. Il a donc un problème à régler avec cette notion, avec le binôme mensonge / vérité qui sont les deux facettes de la même pièce. Il y a donc une projection derrière cette situation.
Les questions à se poser si vous vous reconnaissez dans cette réaction épidermique face au mensonge pourraient être :
- Qu’en est il de mes petits mensonges personnels ? Où est-ce que je me mens à moi-même ? En effet sur un plan psychologique, se mentir à soi-même est aussi grave que mentir à l’autre. Se mentir à soi-même, c’est trahir son intuition, son désir, son besoin profond… et donc son âme.
- Comment est-ce que je me manipule moi-même ? Car la question du mensonge rejoint celle de la manipulation.
- Quels sont mes mensonges ? Quand ai-je été dans une situation où j’ai menti ? Pourquoi me suis-je sentie obligée de mentir ? Pour me protéger ? Pour protéger mon jardin secret ? Pour ne pas décevoir ? Pour ne pas être attrapée ? Où est mon propre problème de conscience ?
Si vous vous reconnaissez dans cet exemple et que vous vous posez correctement ces questions, vous toucherez à votre propre mensonge personnel. Vous pourrez commencer un travail pour vous accueillir, vous pardonner, et surtout cesser de vous mentir à vous-même et de maintenir l’intensité de cette projection.
Sinon, à chaque fois que vous serez face au mensonge de quelqu’un, vous ressentirez ce rejet épidermique. Car en vous, il y a une blessure qui n’est pas réparée. Si votre relation à votre mensonge personnel est réparé, votre réaction sera moins passionnée. Vous vous direz juste : « Tiens, il ment celui là… » et le noterez comme un fait objectif mais vous ne ressentirez plus le besoin de le convaincre de changer. Vous n’aurez plus d’énergie à mettre dans ce combat. Ce ne sera plus le vôtre.
Et tant que ça n’est pas reconnu en vous, tant que vous ne regardez pas en vous pour vous avouer vos mensonges vis à vis de vous même, alors ça signifie que vous ne prenez pas la responsabilité du nœud mensonge/vérité, que vous ne l’avez pas encore regardé correctement. Il est assez logique que vous vous entouriez d’un partenaire qui incarne ce nœud et sur lequel vous pouvez donc le reconnaître c’est à dire “le projeter”. Et vous pouvez reprocher à l’autre ce que vous ne vous êtes pas encore reproché vous-même.
Par contre si vous lisez cet article, vous pouvez sortir de ce système en prenant l’habitude de regarder en vous-même à chaque fois que vous ressentirez une forte émotion de rejet face au défaut de quelqu’un.
Réparer sa blessure personnelle
Lorsque la blessure intérieure est réparée, lorsque la culpabilité silencieuse vis à vis de soi-même est pardonnée, alors face à un menteur, votre émotion changera vraiment (je parle en connaissance de cause vous l’aurez compris). Au lieu de monter sur vos grands chevaux ou de vous mettre en colère, vous verrez que vous resterez très calme.
Vous observerez le mensonge de l’autre comme une donnée captée par vos sens. “Tiens, il ment là”. Mais ça sera son problème, son affaire. Vous, vous aurez réglé votre rapport au mensonge, vous serez même capable de vous autoriser à mentir de temps en temps, par exemple quand quelqu’un vous pose une question indiscrète, pour protéger votre jardin secret et votre vie intime. Car on n’est jamais obligé de tout dire de nous. Et donc vous verrez que vous arriverez de mieux en mieux à détecter les grands et les petits mensonges des uns et des autres, et aussi les fois où ils sont en train de se mentir à eux-mêmes.
Mais vous ne le vivrez plus “mal”, ça les concernera eux, pas vous. Et ça sera le signe que vous avez cessé de projeter sur l’autre votre rapport au mensonge et à la vérité et que vous êtes en paix avec vous-même sur cette question là.
Plus on travaille au retrait des projections dans les relations amoureuses, amicales, familiales, professionnelles, plus on gagne en lucidité et plus on a des relations saines.
En effet, devenant plus conscient de soi-même, on aura moins tendance à s’investir dans une relation de type “fusion” avec une recherche de complémentarité en l’autre, et donc forcément une recherche d’opposition. (Car la complémentarité et l’opposition sont bien entendu elles aussi les deux facettes d’une même pièce !)
Et l’agacement ressenti face aux défauts de quelqu’un sera moins vif. Le cas échéant, on saura que c’est là le signal qu’il faut rentrer en soi et ça deviendra une habitude.
Le retrait des projections = le retrait du beau rôle
On a commencé à évoquer la projection de défauts que l’on ne reconnaît pas en soi sur l’autre, car c’est plus facile schématiquement dirons nous pour illustrer le phénomène. En effet, la recherche de la complémentarité, inhérente à la psychologie humaine, induit ces relations en miroir.
- Si mon partenaire est menteur, alors moi je prends le costume de la vérité. J’ai donc le beau rôle !
- Si mon patron est dur et exigeant, alors moi j’incarne la droiture et la ténacité. J’ai le beau rôle !
- Si mon amie est tout le temps en train de se plaindre, alors moi je suis l’oreille empathique et soutenante. J’ai le beau rôle !
Etc, etc… Faire le travail nécessaire en soi pour permettre un retrait de projections n’est pas simple, car ça signifie que sous bien des aspects, on n’aura plus le beau rôle !
Si j’accède à mes mensonges personnels, je ne serai plus une incarnation de la Vérité. Si je ne travaille plus 70h par semaine, alors je ne serai plus l’employée modèle. Et si je n’ai plus de temps à perdre à complaire mon amie dans sa posture de victime, alors elle cherchera probablement le réconfort auprès de quelqu’un d’autre… Bref, je n’aurai plus le beau rôle. Si je tiens à ce « beau rôle » alors je tiens à la projection qui le rend possible.
Nous allons voir maintenant que nous ne projetons pas sur autrui uniquement les aspects de l’être qui nous déplaisent. Nous projetons aussi des potentialités que l’on ne voit pas en Soi. Et ça c’est une très bonne nouvelle ! Car si vous avez compris ça, alors vous serez d’accord pour récupérer à votre compte les vilains défauts que vous voyez chez les autres. Oui, parce que vous aurez compris qu’en faisant ça, vous allez aussi vous reconnecter à vos propres qualités, oubliées, délaissées ou tout simplement inconnues de vous et qu’il vous reste à expérimenter !
Projeter ses qualités sur l’autre
C’est le même principe que plus haut : pour voir quelles sont parmi vos qualités celles que vous avez tendance à projeter sur les autres, analyser vos relations amoureuses est un bon début.
Par exemple, moi j’ai bien compris que j’avais projeté deux choses sur mes relations amoureuses :
- Mon Ombre – très clairement.
- Et mes qualités – j’ai mis plus de temps à capter ça.
Mon Ombre d’abord en me retrouvant avec des personnes qui incarnaient ce que je m’empêchais d’incarner. J’étais sage, bonne élève, travailleuse, plutôt discrète et perfectionniste. Je masquais mes défauts, mes pulsions contraires, ma mélancolie et je ne m’aimais pas. J’étais donc logiquement attirée par des “mauvais garçons”, rebelles, en échec scolaire, avec des addictions… etc bref on reconnait bien là le principe décrit plus haut de l’expression “les contraires s’attirent”.
Bien entendu, ça ne marchait pas ! Passé la phase de lune de miel comme on dit, c’est à dire la phase de fusion, force est de constater qu’on n’avait plus grand chose à se dire. J’étais trop “sage” pour eux et eux beaucoup trop “à la marge” pour moi.
Et bien entendu les défauts que je leur reprochais étaient ceux qui m’avait attiré chez eux : leurs défauts étaient les miens, mais je ne m’autorisais pas à les vivre vraiment alors je les vivais par procuration à côté d’eux par le biais de la projection. Voilà pour l’Ombre.
Mes qualités ensuite car dans mon type d’amoureux, il y avait toujours quelque chose de baudelairien. On est sur l’archétype du poète maudit un peu, du musicien sensible, de l’anarchiste révolté, de l’hypersensible, de l’autodestruction… Et d’une certaine forme d’insensibilité apparente aussi qui masquait un manque de confiance en soi et une fuite face au sentiment.
Mais tout ça était en moi en réalité, Baudelaire est bien en moi, aujourd’hui je le vois : je suis l’Albatros du poème !
Un fois compris ça, c’est très intéressant : je voyais en l’autre le potentiel artistique, poétique que je ne voyais pas en moi. En réalité, j’ai toujours eu cette sensibilité là, elle fait partie de ma personnalité, et aujourd’hui j’essaie de me la réapproprier. Sûrement que, lorsque j’aurais réussi à mener à bien un projet artistique ou littéraire, alors l’Albatros en moi sera moins gauche et je n’aurais plus besoin d’être en admiration devant des personnes qui incarnent l’artiste que je voudrais être.
Travailler sur ses projections pour avancer vers le Soi
Le Soi, en psychologie analytique, désigne l’ensemble de notre personnalité : ce qu’on connait de soi-même et ce qu’il nous reste à découvrir.
Travailler sur ses projections est donc indispensable pour retrouver le chemin de la responsabilité. La responsabilité de se voir tel qu’on est, avec nos qualités et nos défauts. La responsabilité de viser une appréhension plus mature des relations humaines. La responsabilité de cesser de projeter sur l’autre ses propres problèmes. La responsabilité enfin de renoncer à l’idéal et d’embrasser la complexité de son humanité.
En effet, si on est enferré dans des raisonnements où trônent la projection, on tiendra des discours du type : je ne peux pas accomplir ça mais je n’ai pas le choix. Mon partenaire m’en empêche. Ou ma famille m’en empêche. Ma situation m’en empêche. Ou simplement : je ne suis pas capable, je n’ai pas cette qualité là (un autre que moi l’a).
On projettera donc sur les conditions extérieures la responsabilité de ses réussites et de ses échecs. On restera donc soumis à ce vidéoprojecteur basique qui projette sur le monde son interprétation du monde.
Or si l’on comprend que le monde tel qu’on le voit n’est qu’une des représentations possibles du monde parmi une infinité de déclinaisons… Que la vision qu’on a des choses n’est que le résultat de la perception qu’on en a. Alors on comprendra l’importance de travailler sur ses projections.
Chemin faisant on se découvrira toutes les croyances limitantes qui soutiennent cette perception du monde :
- Je n’en suis pas capable.
- Je suis nulle, je n’ai pas de talent.
- Je suis naïf(ve), je manque d’intuition.
- Je ne suis pas travailleur, je n’ai pas de potentiel.
- Je suis bloqué, ce n’est pas ma faute… etc etc.
On découvrira que ce sont toutes ces croyances font le lit des projections qui biaisent notre vision du monde. Et que derrière elles, il y a des peurs, des blessures, des traumatismes qui demandent juste à avoir voix au chapitre. Alors, si on tend l’oreille, si on leur donne la parole, si on se donne le droit de se réparer, les croyances limitantes n’ont plus lieu d’être, et le film que notre vidéoprojecteur projette sur le monde change sensiblement.
On souffre moins et on voit plus. Comme si la lunette de la caméra gagnait un objectif plus puissant. On peut alors s’imaginer même que notre vidéoprojecteur amélioré est monté sur un drone. Dans une situation qui d’ordinaire nous aurait activé, on peut désamorcer la petite bombe de la projection en se baladant dans la situation, en allant se mettre à la place des uns et des autres. On peut les comprendre, même sans les valider. On peut observer la situation dans son ensemble, s’enrichir des points de vue des autres. Et surtout on peut honorer nos valeurs profondes, avoir une réaction alignée avec qui on est vraiment, et non plus des réactions provoqués par une croyance qui a cristallisé une projection forgée dans un lointain passé…
Puissions nous tous faire monter notre vidéoprojecteur personnel sur un drone, et au besoin, aller faire un tour ailleurs lorsqu’une problématique n’est plus la nôtre. Les projections, lorsqu’elles sont accueillies en conscience, sont toujours une opportunité de se découvrir et d’agrandir son champ de vision.
Dans la seconde partie de cet article, on va s’intéresser aux projections au quotidien. Vous verrez à quel point ce phénomène est important et impacte toute notre vie relationnelle mais aussi notre regard sur nous-même.
La projection au quotidien
Nous venons de poser les bases du principe de ce qu’on appelle la projection en psychologie. Voyons maintenant comment ce phénomène s’exprime régulièrement, dans des situations de la vie courante qui vous parleront à tous. Et puis dans la troisième partie de cet article je parlerai de la présence de la projection en thérapie où il s’agit d’un paramètre important.
Nous avons vu qu’une bonne manière de repérer nos projections courantes est d’analyser nos relations amoureuses. Ainsi on peut observer quelles qualités et quels défauts sont recherchés inconsciemment par nous dans la relation et donc projetés. Ce qu’on voit en l’autre et qui nous énerve ou nous émeut, autrement dit ce qui nous active fortement, touche à une problématique personnelle qui est non résolue.
Mais la projection est également un processus psychologique normal qu’on expérimente soi-même bien souvent sans en prendre conscience – à moins d’avoir effectué un travail sur soi en profondeur – et qu’on subit également de la part de notre entourage.
Les projections reçues de l’entourage
Il y a de nombreuses situations au quotidien qui sont dominées par la projection. C’est souvent elle qui est à la source de disputes, de quiproquos et de malentendus.
Commençons par les projections négatives et puis nous verrons les projections positives.
Recevoir une projection négative
C’est le cas quand quelqu’un projette sur vous une mauvaise intention qui n’est pas la vôtre.
Il vous est un jour arrivé de vous retrouver dans cette situation, où l’autre – que ce soit un collègue, un ami, un parent, un conjoint – vous reprochait d’avoir une intention que vous ne reconnaissiez pas du tout en vous.
Attention, il s’agit ici d’être honnête avec soi-même. Il y en a qui sont passés maîtres dans l’art de la mauvaise foi, mais la mauvaise foi a un pouvoir limité : dans notre fort intérieur, l’âme sait quand ça sonne faux.
Je m’adresse donc ici à ceux qui cherchent à être honnêtes avec eux-mêmes, alignés avec leurs valeurs et soucieux de ne pas se compromettre.
Il y a donc cette personne qui se met à vous soupçonner d’avoir des intentions peu louables. Vous ne voyez pas du tout de quoi elle parle, vous n’avez sincèrement jamais eu de telles intentions ! Vous vous dites : et si, inconsciemment, j’avais eu de telles intentions… Parfois la réponse est oui à l’intérieur, et c’est le signe qu’il y a quelque chose à aller repêcher dans l’inconscient, et cette personne aura donc vu juste.
Mais d’autres fois non ça ne fonctionne pas, ça ne trouve aucune résonance en vous. Comment alors est-ce possible que cette personne vous prête une intention, qu’en toute sincérité, vous ne reconnaissez pas comme étant la vôtre ?
Eh bien votre interlocuteur projette ! Il projette sur vous une intention qu’il pourrait lui-même avoir dans une situation semblable.
- Exemple de la jalousie infondée
Par exemple : j’avais quand j’étais très jeune un copain très jaloux. Moi je n’ai jamais été trop portée sur la jalousie… Peut-être que si j’avais un peu plus accueilli la jalousie en moi, je n’aurais pas eu besoin de m’enticher d’un compagnon aussi jaloux ! Mais donc le voilà qui me reproche régulièrement d’avoir l’intention de le tromper. Je ne vois pas du tout de quoi il parle ni à quoi il fait allusion et je le trouve bien parano…
Jusqu’à ce qu’un jour je comprenne que sa suspicion parle en fait de… lui ! Je réalise alors que s’il redoute à ce point que je le trompe, il y a de grandes chances que cette attitude masque et en même temps trahisse une tendance qui lui appartient en propre. Et de fait, je farfouille un peu et je me rends compte que c’était bien ça : il me reprochait bien d’avoir l’intention de faire ce que lui faisait déjà !
- Exemple de la trahison
J’ai un autre exemple dans lequel une personne avec laquelle je travaille se met soudain à changer d’attitude et à se comporter comme si elle se méfiait de moi. J’apprends plus tard qu’elle sera allée raconter à d’autres qu’elle craignait que je la trahisse.
Ce que je ne vais pas tarder à apprendre aussi c’est que cette personne prépare un coup en douce et donc que c’est elle qui est en train de me trahir ! Inverser ainsi la situation et se persuader de la validité de sa version en incluant les autres dans son histoire, lui était certainement plus facile à vivre sur un plan psychologique que d’assumer son manège…
- Exemple de la méchanceté
On connait tous des personnes très critiques, franchement peu aimables et qui se méfient de tout le monde. Il y a bien sûr un passé douloureux derrière tout ça… Mais avez vous remarqué que ces personnes là sont aussi celles qui se plaignent le plus des autres ? Lorsqu’elles racontent une histoire, à chaque fois le dénouement les place en position de victime et les autres acteurs du drame en sorciers retors…
A se demander : d’où vient la méchanceté finalement ? Est-ce que ces personnes, réellement, ont un karma abominable ? Ou est-ce que c’est leur façon de voir le monde et de considérer les autres qui leur fait voir le mal partout ? Car pour se fâcher avec les gens de manière récurrente, au point d’en parler comme des personnes horribles, ne faut-il pas à un moment donné être soi-même à l’origine de la méchanceté ?
A moindre échelle c’est un peu ce qu’on expérimente lorsqu’on est dans une expression passive agressive. On s’étonne ensuite que les autres se sentent attaqués, mais ils le sont !
Recevoir une projection positive
Le principe est le même avec les projections positives. Une personne peut surestimer votre potentiel à défaut de voir le sien, où vous prêter des intentions que vous n’avez pas.
- Dans la relation
Ainsi il est courant en début de relation qu’une personne projette sur l’autre un désir qui en fait est le sien, et qui n’est pas celui de l’autre. Un peu comme les écureuils dans Merlin L’enchanteur. Les dames écureuils projettent sur Merlin et Arthur transformés eux aussi en écureuils une attirance qui n’est pas réciproque.
Et c’est difficile de s’en rendre compte, car les affects s’en mêlent, les émotions, les désirs… Pour identifier la projection dans ce cas là, il faut du temps et vraiment revenir aux faits. Seuls l’observation des faits objectifs peut permettre d’y voir clair dans la réalité de ce qui est là.
Cette projection de désir peut se transformer à la longue en projection de besoin : on attend que l’autre devine notre besoin sans le formuler ! Ce qui donne lieu à des disputes qui ont pour base… La projection, si si, encore… Aussi exprimer ses désirs et ses besoins nous épargne d’attendre que l’autre les devine – autrement dit qu’ils deviennent nos projections – spoiler alerte : ça ne fonctionne pas.
- Dans l’enfance
L’enfant est sensible aux projections de ses parents. Si ses parents sont maltraitants, il aura beaucoup de difficulté à se construire une image solide de lui-même. Si ses parents ne le croient pas “capable” il aura du mal à sentir ses ressources en lui. Mais ce n’est pas impossible, il y a des parcours de vie qui sont des miracles ! Et d’autres qui sont des combats longs et courageux pour retrouver le chemin vers soi.
Si ses parents sont exigeants, l’enfant aura une exigence de lui-même qui peut paradoxalement le paralyser.
Si ses parents projettent sur lui leur propres désirs, l’enfant cherchera à aller dans leur sens pour les satisfaire, et ainsi satisfaire leur projection à eux et non pas son propre désir à lui.
C’est typiquement l’idée qu’on se fait de la mère qui pousse sa fille à devenir un petit rat de l’Opéra pour vivre par procuration son propre désir de gloire. Ou de ces nageurs qui passent des heures dans l’eau tous les jours pour obéir à un parent. Ou encore ces entraîneurs de tennis qui prennent plus de plaisir que leur enfant à les voir gagner des matchs !
Ainsi il est courant qu’arrivé à un certain moment de la vie, la question qui se fait jour soit : “Mais et moi, qu’est-ce que je veux vraiment? Qui suis-je vraiment?”
L’enfant, support des projections des parents, est devenu un adulte qui a bien du mal à s’autoriser à se soustraire aux exigences parentales, devenues les siennes et avec lesquelles il s’est construit.
Il en va de même pour un enfant à qui on aurait dit “tu es bête” parce qu’il avait des difficultés scolaires : il aura du mal à cultiver son intelligence, à avoir accès à sa sagesse intérieure. Ou à un enfant qu’on aurait qualifié de “scientifique” et “qui ira loin” : il sentira un blocage en lui s’il s’intéresse à des activités qui ne sont pas voués à l’emmener “loin.”
Ainsi, si vous avez des enfants, essayez un maximum d’éviter de leur faire porter le poids de vos projections ! Ce n’est pas simple et dans une moindre mesure, on projettera toujours un peu car la projection est un paramètre incontournable de notre subjectivité. En prendre conscience permet déjà de tenir nos projections à distance, et de permettre à l’enfant de reconnaître celles qui lui sont propres et qui le relient à ses ressources individuelles.
Exemple de l’amitié
Dans l’amitié, l’ami est le support de toutes les valeurs que l’on porte en Soi. C’est aussi pour cela que l’amitié est vraiment merveilleuse ! Tout ce qu’on aime chez l’ami, toutes les raisons qui font qu’on aime passer du temps avec lui : son type d’intelligence, son style d’humour, ses réactions, sa sensibilité, son mode de raisonnement… Sont plein de choses que l’on valide dans l’ensemble car elles reflètent les nôtres.
Sans projection, pas d’amitié possible. La projection en amitié devient cette capacité à aimer l’autre pour son authenticité et sa vulnérabilité. La bonne nouvelle c’est que si on arrive à être touché par l’autre et à se réjouir à ce point de passer du temps en sa présence, alors ça veut dire qu’on peut se réjouir doublement : car cela signifie que dans l’absolu, on peut être capable de passer du temps avec soi-même, de se regarder soi-même, de se respecter soi-même, de se traiter avec la révérence qu’on témoigne pour cet autre.
Bien entendu, quand il y a de fausses amitiés, c’est encore la même affaire : les deux sont tenues par des jeux de projections : si j’ai une amie garce et mauvaise langue, alors je peux projeter ça sur elle. Si par contre j’en prends conscience et que ça ne m’intéresse plus, elle finira par sortir de ma vie naturellement et sans esclandre.
Pour en savoir plus sur la manière dont la projection se manifeste en thérapie, je vous invite à poursuivre votre lecture et vous aurez ainsi fait le tour de la question.
La projection en thérapie
Vous avez compris que le principe de la projection est inhérent à la psychologie humaine et donc qu’on le retrouve tous les jours dans énormément de situations différentes.
Ainsi la projection s’invite aussi en thérapie comme nous allons le voir maintenant, pour terminer notre petit tour de ce concept important.
Pas de thérapie efficace sans projection
Le transfert et le contre-transfert
Les notions de transfert et de contre-transfert ont été théorisées par Sigmund Freud. Centrales en psychanalyse et en psychologie analytique, elles concernent en réalité toutes les formes de thérapie, c’est-à-dire tous les contextes dans lesquels il y a une personne qui vient chercher de l’aide auprès d’un professionnel pour marcher vers son bien-être.
Le transfert désigne la manière dont le thérapeute ou l’analyste est perçu par le patient. Le contre-transfert désigne la manière dont le thérapeute reçoit l’histoire du patient et entre en résonance avec elle. (Je me note de développer ces deux notions un de ces quatre, mais là si je m’étends, cet article va devenir beaucoup trop long ! )
La qualité du transfert est nécessaire à la réussite de la thérapie. En effet, si le patient a un “bon feeling” vis à vis de son thérapeute, il se sentira à l’aise et prêt à se confier. Si au contraire la tête de son analyste “ne lui revient pas”, ou si son style ne le met pas à l’aise, ça va être compliqué !
Mais alors pourquoi certains vont aimer travailler avec tel psy, tandis que d’autres ne vont pas apprécier ce psy en question ? Est-ce que le dit psy change en fonction des personnes qu’il reçoit ? Ou bien est-ce que ce sont les personnes qui le consultent qui perçoivent d’elle des choses différentes?
La bonne réponse est la deuxième. Et ce qui est en jeu ici et qui détermine si le transfert est propice ou non, si le “courant passe” du point de vue du patient ou pas, s’il choisira de travailler avec ce thérapeute là ou pas… C’est encore la projection.
La projection est donc un paramètre central en thérapie et en analyse : elle préside au choix de l’analyste par l’analysant.
Ce qu’on projette sur son thérapeute
Quand on cherche à être accompagné par un thérapeute quel qu’il soit, et particulièrement lorsqu’on souhaite s’engager en psychanalyse, on cherche en fait un interlocuteur capable de nous écouter, de nous aider à exprimer ce qui n’a pas encore été dit et d’accéder à certaines réalisations.
C’est bien tout le principe de la psychanalyse, “l’analyse de la psyché”. En analyse, on se raconte, on raconte ce qu’on vit, les idées qui nous traversent, les émotions, les événements que l’on rencontre… La libération de la parole est importante, l’idée de pouvoir parler de tout sans tabous, c’est pourquoi le transfert est la condition de l’analyse : c’est la condition de la confiance.
Cependant on ne cherche pas “que” à parler, à dire ce que l’on sait déjà. On cherche à voir plus loin, à aller toucher d’autres vérités ,à comprendre des choses que l’on ne comprend pas, à faire la paix avec un passé qui ne passe pas, à découvrir des choses qu’on ne connaît pas en Soi : une autre vision des choses, de nouvelles façon de réfléchir, des désirs auxquels on n’avait pas accès, un regard plus apaisé sur notre histoire… etc.
Autrement dit, dans la figure du psy, on cherche un interlocuteur qui nous permette d’accompagner ce mouvement de réconciliation intérieure, d’élargissement de Soi et de quête de maturité. On projette donc sur l’analyste une altérité et une neutralité qui sont en nous-même. Le psy en effet ne va pas nous dire quoi faire et comment on doit penser. Il va nous accompagner pour aller chercher en nous les réponses qui s’y trouvent.
L’analyste est donc un moyen, un intermédiaire, un support de projection qui permet de dialoguer avec soi-même, avec une partie de soi qui est plus facilement accessible lorsqu’elle est projetée sur l’autre, dans le cadre des consultations.
Si ça vous est encore un peu obscur, je vous donne quelques exemples pour illustrer ce principe.
Exemples de projections en thérapie
“J’vous vois venir !”
J’ai un analysant qui me dit régulièrement : “Alors, j’vous vois venir, vous allez me répondre ceci, cela…” et il m’explique ce que je suis sur le point de lui répondre.
Ce qui est intéressant c’est qu’il est très rare que ça soit le cas. La plupart du temps je me dis : “Non, c’est pas vraiment (voir pas du tout) ce que j’aurais répondu…” Mais lui n’en a rien à faire dans le fond, ça ne l’intéresse pas de savoir ce que réellement j’aurais répondu.
Procédant ainsi il s’approprie l’analyse qui finit par imprégner sa manière de réfléchir et lui permet de mettre en perspective ses propres raisonnements. Et c’est parfait !
Ce que je représente pour lui est donc un interlocuteur porté sur la contradiction. Il projette sur moi son contradicteur intérieur, son propre esprit de contradiction. Et c’est ce dialogue intérieur sur le mode “Léa Le Gall m’aurait dit ça” qui lui permet de progresser et de tempérer son impulsivité.
“J’ai pensé à vous !”
Ca c’est un truc qui revient assez souvent : « j’ai vécu ceci ou j’ai eu cette idée, et j’ai pensé à vous ». A moi, pourquoi ? En fait l’analysant ici n’a pas pensé à moi. Mis à part dans le cadre de nos séances, il ne me connaît pas vraiment, il se connaît mieux lui-même à travers moi plutôt. En fait, il a pensé qu’il me raconterait ce qu’il a vécu et les associations d’idées que ça a créé en lui.
Et c’est normal ! La discussion qui se déroule en analyse se développe de séance en séance. Je finis par faire partie des meubles en quelque sorte. Ce n’est donc pas à moi en particulier qu’il a pensé, c’est au moment où il aborderait ce sujet, à la manière dont il traiterait cette information à l’occasion d’une séance d’analyse. Avec moi certes, mais surtout avec cette altérité en lui qu’il me donne d’incarner.
La projection de l’idéal
Il y en a aussi qui, en début d’analyse, projettent sur l’analyste l’idéal. Comme si l’analyste n’avait pas de zones d’Ombre, pas de défaut, qu’il était une statue de sage… C’est oublier que pour être analyste, il faut soi-même avoir fait une longue analyse et y être encore.
Avant d’être analyste, l’analyste lui-même est quelqu’un qui a fait un long cheminement et le point de départ n’est jamais intellectuel : on n’entre pas en analyse parce que c’est enrichissant intellectuellement ou parce qu’on a des ambitions professionnelles. On entre en analyse parce qu’on en a besoin. Et un jour, parfois, il arrive que ça nous ait tellement aidé qu’on passe de l’autre côté.
Ainsi quand il y a une projection d’idéal, elle est un indice dans le rapport de l’analysant à l’idéal. Et on va pouvoir travailler dessus. Le contre-transfert, c’est à dire la résonance en la personne du psychanalyste, va lui permettre de ressentir les endroits sur lesquels il va être intéressant de faire la lumière, où se trouvent des blocages.
La projection de l’Ombre
De la même manière, il peut arriver qu’un analysant projette des intentions mauvaises sur l’analyste. Il s’agit alors de l’expression de craintes et d’insécurités qui viennent de loin. C’est un cap à passer et si l’analysant parvient à renoncer à ces projections là, il fera un grand pas en avant.
Il comprendra que c’est son histoire qui lui crée des craintes, et que ces systèmes de pensées erronées qu’il projette sur l’analyste, sont des schémas qu’il a observé à maintes reprises dans son relationnel. Il réalisera alors que, de la même manière qu’il s’est trompé sur les intentions de l’analyste, il peut se tromper sur le jugement qu’il porte aux personnes qu’il côtoie et commencer à changer son rapport à l’autre. C’est important car sinon il risque d’être souvent déçu et d’avoir énormément de mal à être dans un rapport à l’autre apaisé.
Il va falloir aller réparer les blessures qui ont forgé ces insécurités pour permettre le retrait des projections. L’analyste dans ces cas là doit faire preuve de patience et ne rien prendre personnellement, tout en rappelant le cadre de manière bienveillante. La proximité qui s’installe au fil des séances entre l’analysant qui se raconte et l’analyste qui l’accompagne, aura permis de rejouer des craintes et ce faisant à les aborder.
“Qu’est-ce qui me dit que ce n’est pas votre idée?”
Enfin pour terminer cette série d’exemple, il y a cette interrogation qui peut se faufiler chez tout un chacun : « Et si ce n’était pas mon idée, mais celle de mon analyste ? » C’est normal car lorsqu’on avance bien, on change notre façon d’aborder pas mal de choses : on troque un système de pensée trop étroit dirons nous, pour un système de pensée plus adapté à la personne qu’on devient.
Forcément, il y a des réglages à faire dans notre façon de vivre, et certains ne sont pas simples. Face à la difficulté, on peut rencontrer le raisonnement suivant : »Sans psychanalyse, peut-être n’aurais je pas été prêt à prendre cette décision qui me tient à cœur, je n’aurais peut-être pas découvert cette ressource en moi… Mais la tâche s’annonce difficile… Et si en fait, j’en avais vraiment envie ? Et si finalement ce n’était pas mon analyste qui m’avait induit cette idée ? »
Le doute est sain, l’hésitation l’est aussi. Et cet enchaînement d’idées est plutôt logique !
Bon, moi j’ai l’arme fatale pour contre-attaquer… (je suis en fin d’article, j’ai le droit de commencer à me mélanger les registres de langue) L’analyse des rêves ! Eh oui car, travaillant beaucoup avec les rêves, il suffit d’aller voir ce que disent les rêves. Le message d’un rêve provient de l’inconscient du rêveur. Et les rêves traitent de la problématique du moment. Ainsi, il suffira de voir ce que disent les rêves du moment et de noter ceux qui arrivent pour vérifier ce que l’âme en dit…
L’analysant verra par lui-même si ses rêves soutiennent ce qu’il entreprend ou s’il y a quelque chose à tempérer. Il aura compris que rien n’est figé dans l’âme, tout est en mouvement, et que la vie est une affaire de réglages de chaque jour. Il sera devenu plus souple et sensible aux variations de sa petite musique intérieure et aux récits de ses rêves.
Merci de m’avoir lue !
Faites de beaux rêves et notez les !
Léa Le Gall
Si cet article vous a plu, je vous invite à regarder mes vidéos sur Youtube à propos du rêve et de la psychologie analytique de Carl Gustav Jung
Voir la chaîne YT de Léa Le Gall
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